jeudi, juin 07, 2007

Les Contemplations, Victor Hugo


J'ai surtout lu et étudié le livre IV, celui des poèmes consacrés à la mort de sa fille.
J'avais presque 20 ans (et comme Nizan, je ne laisserai personne dire que c'est le plus bel âge de la vie), pas d'enfant et pas de prévision d'en avoir un jour, sauf à innover en me passant d'aide féminine, et pourtant la douleur de ce père-là m'a touché profondément.

Les 10 000 vers des Contemplations ne sont pas tous beaux, pas tous inoubliables, loin s'en faut, mais peu de recueils contiennent un tel nombre de vers émouvants. (c'est subjectif, j'en ai conscience).

Puisque mon coeur est mort, j'ai bien assez vécu.

Je ne me tourne plus, même quand on me nomme

On ne peut distinguer, la nuit, les robes bleues

Des anges frissonnants qui glissent dans l'azur


Et mon coeur est soumis mais n'est pas résigné


Et l'on voit sur le bord de la mer

Fleurir le chardon bleu des sables


Il n'avait qu'à me laisser vivre

Avec ma fille à mes côtés


Je n'étais jamais gai quand je la sentais triste


Pourquoi m'as-tu pris la lumière

Que j'avais parmi les vivants


Et n'être qu'un homme qui passe

Tenant son enfant par la main


Oh ! l'herbe épaisse où sont les morts


C'était le bonheur de ma vie

De voir ses yeux me regarder


Où la morte au front pâle est comme un lys vivant


Aussi bien, sans être philosophe, Victor Hugo développe une philosophie complexe au travers de poèmes métaphysiques, que l'on m'a faite étudier et que je serais bien en peine d'expliquer maintenant, mais une philosophie duelle où règne le contraste de l'obscurité et de la lumière, contraste qui donne sa puissance à son style fait de fulgurances et de noirceurs, aussi bien dans ses vers que dans ses dessins, moins connus.

Elles sont les blancheurs suprêmes
De tout le sombre gouffre humain

Guider les foules décrépites
Vers les lueurs de l'horizon

Chaque rayon d'en haut est-il un fil de l'Ombre ?

O vivants, serions-nous l'objet d'une dispute
Deux joueurs effrayants apparaissent dans l'Ombre



Mais que ce saphir sombre est un abîme obscur

Nous ne voyons jamais qu'un seul côté des choses
L'autre plonge en la nuit d'un mystère effrayant

Dans l'Ombre où l'on dirait que tout tremble et recule



1 commentaire:

Faust a dit…

C'est pour moi, de loin, le plus beau poème de tout le recueil.
L'œil pourrait il être celui de la mort ou seulement l'obstination de l'Homme à croire en Dieu à cette époque?