
J'ai surtout lu et étudié le livre IV, celui des poèmes consacrés à la mort de sa fille.
J'avais presque 20 ans (et comme Nizan, je ne laisserai personne dire que c'est le plus bel âge de la vie), pas d'enfant et pas de prévision d'en avoir un jour, sauf à innover en me passant d'aide féminine, et pourtant la douleur de ce père-là m'a touché profondément.
Les 10 000 vers des Contemplations ne sont pas tous beaux, pas tous inoubliables, loin s'en faut, mais peu de recueils contiennent un tel nombre de vers émouvants. (c'est subjectif, j'en ai conscience).
Puisque mon coeur est mort, j'ai bien assez vécu.
Je ne me tourne plus, même quand on me nomme
On ne peut distinguer, la nuit, les robes bleues
Des anges frissonnants qui glissent dans l'azur
Et mon coeur est soumis mais n'est pas résigné
Et l'on voit sur le bord de la mer
Fleurir le chardon bleu des sables

Il n'avait qu'à me laisser vivre
Avec ma fille à mes côtés
Je n'étais jamais gai quand je la sentais triste
Pourquoi m'as-tu pris la lumière
Que j'avais parmi les vivants
Et n'être qu'un homme qui passe
Tenant son enfant par la main
Oh ! l'herbe épaisse où sont les morts
C'était le bonheur de ma vie
De voir ses yeux me regarder
Où la morte au front pâle est comme un lys vivant
Aussi bien, sans être philosophe, Victor Hugo développe une philosophie complexe au travers de poèmes métaphysiques, que l'on m'a faite étudier et que je serais bien en peine d'expliquer maintenant, mais une philosophie duelle où règne le contraste de l'obscurité et de la lumière, contraste qui donne sa puissance à son style fait de fulgurances et de noirceurs, aussi bien dans ses vers que dans ses dessins, moins connus.
Elles sont les blancheurs suprêmes
De tout le sombre gouffre humain

Guider les foules décrépites
Vers les lueurs de l'horizon
Chaque rayon d'en haut est-il un fil de l'Ombre ?
O vivants, serions-nous l'objet d'une dispute
Deux joueurs effrayants apparaissent dans l'Ombre

Mais que ce saphir sombre est un abîme obscur
Nous ne voyons jamais qu'un seul côté des choses
L'autre plonge en la nuit d'un mystère effrayant
Dans l'Ombre où l'on dirait que tout tremble et recule
1 commentaire:
C'est pour moi, de loin, le plus beau poème de tout le recueil.
L'œil pourrait il être celui de la mort ou seulement l'obstination de l'Homme à croire en Dieu à cette époque?
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